top of page

Le Marionnettiste

Pour cette histoire, nous allons avoir besoin d’un peu de contexte.


Lucas, Rose et Jérémy sont trois frères et sœurs inséparables, élevés dans une petite maison de campagne.

Éric, l’aîné de la fratrie, a 14 ans. Tenant son rôle très à cœur, il veille toujours sur son petit frère et sa petite sœur. Il protège Rose, la traitant d’ailleurs comme une véritable princesse, et Jérémy, son petit frère rêveur, qu’il guide dans toutes leurs aventures.


Pourtant, Rose ne se considère pas comme une princesse. Du haut de ses 12 ans, elle est plutôt la casse-cou de la fratrie. Grandir entre deux garçons l’a endurcie, et elle a appris à jouer à leurs jeux, à grimper aux arbres et à s’aventurer là où ils n’auraient jamais osé seuls. C’est même souvent elle qui est à l’origine de leurs plus grandes bêtises !


Enfin, il y a Jérémy, 11 ans. Il est le plus rêveur du trio. Depuis qu’il est petit, il nourrit un seul et unique rêve. Un rêve que chaque petit garçon a eu au moins une fois dans sa vie : devenir astronaute.

Ses journées sont ponctuées d’histoires d’étoiles et de missions spatiales qu’il raconte inlassablement à ses frère et sœur.


Ils vivent dans un petit village reculé nommé Ettennoirram, un endroit modeste, bordé de vastes champs et de forêts épaisses. Le village ne se compose que d’une longue allée entourée de maisons rustiques, et les distractions sont rares.

Alors, pour s’occuper, il faut parfois innover. Surtout à cet âge-là, vous vous en doutez.


Et ce jour-là, Rose avait eu une idée. Une idée qui, comme toujours, allait les mener plus loin que prévu.



Partie 1 : L'idée de Rose

Rose (avec excitation) :

"Bon les gars, ça vous dirait d’aller faire un tour dans la maison flippante ?"


Éric (soupirant, mais inquiet) :

"T’es folle ou quoi, Rose ? On ne va pas là-bas ! Papa et maman ne veulent pas qu’on s’éloigne trop de la maison, de toute façon."


Leurs parents avaient été clairs : ne pas sortir du village. Ils avaient le droit de jouer dans le jardin, de se balader à vélo dans le village mais jamais sans en sortir.


Rose (moqueuse) :

"Arrête de faire ta flippette, on n’a plus quatre ans, hein…"


Cette fameuse maison flippante, c’était la seule maison du coin à être complètement abandonnée. Elle se trouvait à près de deux kilomètres du village, à la lisière de la forêt.


À plusieurs reprises, ils avaient enfreint les règles de leurs parents pour s’en approcher, observant de loin ses fenêtres barricadées et sa porte close. Ils avaient fini par la surnommer “la maison flippante”.


Mais jamais ils n’avaient osé aller plus loin. Jusqu’à aujourd’hui.


Après de longues minutes à jouer avec les nerfs de son frère aîné, Rose finit par le convaincre.


Éric (résigné, voix d’enfant) :

"Bon… d’accord. Mais on y va, on jette un coup d’œil, et on revient tout de suite. Promis ?"


Rose (souriante, voix d’enfant) :

"Promis, chef !"


Jérémy, de son côté, était déjà à moitié convaincu. L’idée d’explorer une maison abandonnée l’excitait autant qu’elle le terrifiait.


Jérémy (hésitant, voix d’enfant) :

"Vous êtes sûrs que c’est une bonne idée… ?"


Mais il n’eut pas le temps de protester davantage. Rose et Éric enfourchaient déjà leurs vélos. Ne voulant pas être laissé derrière, il prit le sien en soupirant.


Les trois enfants pédalèrent à vive allure sur le chemin terreux, le vent sifflant dans leurs oreilles, l’excitation montant au fur et à mesure qu’ils s’approchaient de « la maison flippante ».


Finalement, après plusieurs minutes de trajet, ils arrivèrent devant la maison.

Ils posèrent leurs vélos contre un arbre et observèrent la bâtisse de plus près.

Elle était encore plus sinistre que dans leurs souvenirs.


les enfants découvrant la maison

Construite entièrement en bois, elle paraissait sur le point de s’effondrer. La peinture écaillée et le toit affaissé donnaient l’impression qu’elle n’avait pas été habitée depuis des siècles. Toutes les fenêtres étaient recouvertes de planches clouées de travers.


Rose (chuchotant avec excitation) :

"Alors, on y va ?"


Éric hésita un instant. Son regard parcourut la façade sinistre de la maison, puis se posa sur Jérémy, qui se tenait légèrement en retrait, l’air inquiet.


Éric (hésitant) :

"On jette juste un œil… et on s’en va, OK ?"


Rose hocha la tête avec un sourire malicieux.



Partie 2 : Derrière les planches


Les trois enfants avancèrent prudemment jusqu’au perron. Rose, toujours la plus téméraire, posa sa main sur la poignée de la porte et tenta de l’ouvrir.


Rose (fronçant les sourcils) :

"C’est fermé… évidemment."


Éric la rejoignit, examinant les planches clouées sur les fenêtres, et s’attaqua à l’une d’elles.


Éric (murmurant) :

"Si on arrive à dégager ces planches, on pourra passer par là."


Rose et Éric tirèrent de toutes leurs forces sur les morceaux de bois épais, arrachant les clous rouillés un à un. Après de longues minutes d’efforts, ils avaient réussi à dégager une ouverture suffisamment grande pour se faufiler à l’intérieur.


Jérémy (voix tremblante) :

"Attendez, j’ai vu quelqu’un à l’étage !"


Rose (rire nerveux) :

"Arrête de dire n’importe quoi, t’as trop d’imagination, toi ! T’as vu l’état de la baraque ? C’est pas comme ça que tu nous feras changer d’avis !"


Avant qu’ils ne puissent réfléchir davantage, Rose attrapa une pierre au sol et la lança contre la vitre, la brisant.


Sans plus attendre, Rose passa la première à travers l’ouverture. Éric lui emboîta le pas, suivi de Jérémy qui, malgré la peur qui lui tordait le ventre, ne voulait pas rester seul dehors.


Une fois à l’intérieur, le silence était oppressant. Tout semblait figé dans le temps.


Ils se trouvaient dans un couloir étroit, où l'air était lourd, chargé d'une odeur de bois humide et de poussière accumulée depuis des années. L’obscurité régnait, à peine percée par les rayons de lumière qui filtraient à travers les interstices des planches clouées sur les fenêtres.


Rose (chuchotant) :

"Chut, écoutez…"


*Bruit d'un léger bourdonnement à peine perceptible.*


Les trois enfants avancèrent lentement, suivant le bourdonnement sourd qui semblait émaner d’une pièce voisine.

Lorsqu'ils pénétrèrent dans ce qui semblait être le salon, leurs regards se posèrent immédiatement sur une vieille télévision poussiéreuse, trônant au centre de la pièce.

Elle était allumée.


[Bruitage : crépitement de la télévision, voix indistinctes en arrière-plan.]


L'écran affichait une image brouillée, des formes vagues qui semblaient danser.


Éric fit un pas en arrière, le regard fixé sur la télévision.

Juste devant celle-ci, sur le canapé, se tenait un pantin de bois.

Il était grand. Au moins de la taille d’un enfant de 10 ans.

Assis, il semblait regarder en direction de la télé, son regard vide et vitreux, dans une expression de tristesse si intense qu’il aurait semblé humain dans cette pénombre.

Illustration du pantin devant la télé

Éric (murmurant) :

"Ok, c’est trop… On se casse, Rose. Tout de suite."


Mais à peine avaient-ils fait demi-tour qu'un bruit résonna à l'étage.


Ils se figèrent instantanément, le cœur battant à tout rompre dans leur poitrine.

Un échange de regards suffit à comprendre ce qu’ils devaient faire.

Fuir.

Dans un silence quasi parfait, ils détalèrent vers la porte d’entrée…

Mais elle était toujours verrouillée.

Rose, paniquée, tira sur la poignée sans succès.


Rose (chuchotant d’un ton paniqué) :

"Elle est bloquée, merde… Merde !"


Éric balaya la pièce du regard et aperçut une autre porte.


Éric (voix pressée) :

"Là, vite !"


Ils se précipitèrent à l’intérieur de la pièce sombre et refermèrent la porte derrière eux.

La seule source de lumière provenait d’une petite ouverture dans les planches de la fenêtre barricadée.

Le silence retomba brusquement.

Ils retenaient leur souffle, l’oreille tendue vers le bruit des pas lourds qui résonnaient lentement dans l’escalier.


Ils s’étaient réfugiés dans ce qui semblait être une ancienne salle à manger, mais l’atmosphère était étrange. Leurs yeux commencèrent à s’habituer à l’obscurité, et ce qu’ils découvrirent figea Rose sur place.

Dissimulées sous de vieux draps blancs, une dizaine de formes se tenaient immobiles dans la pièce.

Des formes à hauteur d’homme.

Rose s’approcha lentement, le souffle court, et tendit la main vers l’un des draps.


Éric (suppliant à voix basse) :

"Non, Rose… Ne touche à rien."


Mais c’était trop tard.

Elle tira sur le drap d’un coup sec, révélant…

Un mannequin de bois, assis sur une chaise.

Il avait le regard figé, sa tête peinte grossièrement en blanc. Ses mains et ses pieds étaient attachés à des ficelles qui pendaient du plafond.

Soudain, un bruit émanant d’un autre drap les fit tous sursauter.


Voix inconnue (chuchotement plaintif) :

"Pitié… aidez-moi..."


Une voix… faible, tremblante.


Éric prit son courage à deux mains et s’avança vers l’origine du bruit. Il arracha violemment le drap, révélant une scène d’horreur.

Un enfant, pâle et tremblant, était assis sur une chaise. Son visage, blanchi par une peinture grossière, était marqué par la terreur.

Il n’avait plus de paupières. Comme si elles avaient été… découpées. Ses yeux révulsés étaient pointés sur ceux d’Éric, qui eut l’impression que son cœur allait sortir de sa poitrine.

Ses poignets et ses chevilles, attachés eux aussi à des fils, étaient en sang.


La porte s’ouvrit lentement.


Les enfants, complètement horrifiés, regardèrent dans sa direction.

Une silhouette gigantesque apparut.

Une forme si grande qu’elle emplissait toute la largeur de la porte.

La silhouette, qui paraissait trop grande pour être humaine, baissa lentement la tête pour entrer dans la pièce.


La silhouette effrayante entrant dans la pièce

En avançant, la silhouette laissa place à ce qui semblait être un monstre.

Un homme démesurément grand. Il devait faire dans les 2m30 ou 2m40.

La lumière, permettant désormais d’entrevoir son visage, révéla un visage... gorgé d’une haine profonde. Son souffle semblait être celui d’un ours.

L’homme leva lentement une main… immense.

Il attrapa la tête d’Éric et leva le pauvre garçon sans aucune difficulté en poussant un cri de rage terrifiant.


Éric (étouffé, suffocant) :

"PARTEZ !"


Le géant jeta Éric contre le mur avec une force inhumaine.

Un bruit sourd résonna lorsque la tête du garçon s’écrasa contre le bois.

Rose, sous le choc, attrapa la main de Jérémy et le tira en arrière.

Sans se retourner, ils coururent à toute vitesse hors de la pièce.

Ils sautèrent dans le même interstice par lequel ils étaient entrés et s’enfuirent en courant.


Rose et Jérémy ne s’arrêtèrent de courir qu’une fois arrivés devant leur maison.



Partie 3 : Ce qu'il reste


Vingt ans ont passé depuis cette nuit fatidique.

Vingt années où Rose et Jérémy ont tenté de vivre avec le poids de ce qu’ils avaient vu…


Après leur fuite, leurs parents avaient immédiatement contacté la police.

Pourtant, personne ne leur avait jamais dit ce qu’ils avaient retrouvé dans la maison.

Tout ce qu'ils savaient, c'est que l’inconnu avait eu le temps de disparaître avant l’arrivée des forces de l’ordre.


L’affaire n’était même pas parue dans les journaux, car le maire d’Ettennoirram avait étouffé l’affaire, pour on ne sait quelle raison.


Les parents de Rose et Jérémy ne s’étaient jamais remis de cette histoire.

La peur, la culpabilité et l’incompréhension avaient rongé leur foyer jusqu’à les pousser à vendre leur maison et à déménager loin, très loin.


Mais eux, les survivants, avaient dû continuer…


Devinez quoi ?

Contre toute attente, Éric avait survécu.

Malgré ses blessures, il avait fini par s’en remettre physiquement.

Aujourd’hui, il était mécanicien, vivant à des centaines de kilomètres de cette maudite maison, essayant d’enterrer les souvenirs.


Jérémy, lui, avait réussi à concrétiser son rêve d’enfant.

Il était devenu astronaute. Marié, père d’un petit garçon de huit ans, il menait une vie parfaite.

Dans une semaine, il réaliserait son rêve ultime : partir pour sa première mission spatiale.

Il avait même pu se payer la voiture de ses rêves : une BMW bleue.

Jérémy avait magnifiquement su rebondir de son drame familial...


Les deux frères n’avaient jamais été aussi soudés.


Quant à Rose…


Elle, c’était une autre histoire.

Incapable de tourner la page, rongée par la culpabilité, elle avait pris une décision incompréhensible pour tous.


Elle avait racheté la maison.


Rose était retournée là où tout avait commencé.

Elle avait vidé ses économies, ignoré les supplications de ses proches et s’était installée seule dans la maison flippante.


Elle disait vouloir s’assurer que plus jamais personne n’y remette les pieds.

Elle faisait souvent des crises où elle revivait en boucle cette journée d’horreur.

Chaque nuit, elle affirmait entendre des bruits de pas.

Dans ses pires cauchemars, elle voyait cette silhouette gigantesque… toujours là, à l’observer, immobile, derrière les planches clouées des fenêtres.


Sa famille pensait qu’elle avait sombré dans la folie.


Et peut-être avaient-ils raison.


Puis, un jour...


Un soir, alors que Jérémy rentrait d’une longue journée d'entraînement, son téléphone vibra sur la table basse.

Un appel de Rose.

Il soupira.


Depuis qu’elle vivait là-bas, elle le contactait régulièrement, à des heures improbables, toujours avec le même ton paniqué.


Mais cette fois, sa voix semblait différente.


Rose (paniquée) :

"Jérémy... il est là. Il est là, je t’en supplie, viens vite !"


Bip Bip Bip


Puis, plus rien.


Jérémy resta un moment figé, fixant l’écran de son téléphone.

Encore une crise d’hystérie ?

Ses parents étaient en vacances, il était le seul à pouvoir intervenir.


Il passa une main dans ses cheveux et grogna.


Jérémy (murmurant) :

"Pourquoi ils refusent de la faire interner… ?"


Malgré sa lassitude, il enfila son blouson, envoya un message rapide à Éric pour lui demander de le rejoindre là-bas, et prit la route.

Une heure de trajet à travers les routes sinueuses de la campagne.

Jérémy gara sa voiture devant la maison flippante.

Elle était là, toujours aussi sinistre, rongée par le temps.


Jérémy (murmurant) :

"Pourquoi elle s’inflige ça ?… sans déconner…"


Jérémy entra sans même sonner.

En entrant, la maison était d’un calme platonique.

Il avança.

Des souvenirs l’assaillirent instantanément.


Son regard se posa sur le tableau accroché à sa droite dans le couloir.

Mais sur ce tableau, c’était sa femme.

Peinte à la manière des portraits du XIXᵉ siècle, dans une robe de l’époque.


Jérémy (voix basse, inquiète) :

"Non mais c’est quoi ça ?"

"ROSE ?!"


Sa voix résonna dans toute la maison.


Sa sœur lui sauta dessus comme si elle était apparue de nulle part.


Rose (apeurée) :

"Nan mais ça va pas ? Tais-toi, ils vont nous entendre !" (murmuré)


Jérémy :

"Rose, viens, je vais te coucher. On va faire un tour de la maison avant, et tu verras qu’il n’y a rien à craindre."


Rose (apeurée) :

"CHHUUUT, mais t’es fou ou quoi ?"


Jérémy avait l’habitude des crises de sa sœur.

Il la prit d’une poigne douce par le bras et monta doucement l’escalier.

Il entra dans la chambre, et là, un second détail le perturba.

Au pied du lit se tenait un tas de jouets...

Dont une réplique exacte de la BMW bleue qu’il s’était achetée.

Étrange coïncidence.

Mais il ne dit rien.


Jérémy :

"Allez, couche-toi Rose s’il te plaît."


Sa sœur tremblait comme une feuille et semblait terrifiée.


Rose (apeurée) :

"CHHUUUT"


Jérémy :

"Rose, c’est dans ta tête tout ça, s’il te plaît !"


Rose (murmurant en sanglot) :

"Il ne faut surtout pas qu’on parle, sinon il va nous tuer..."


Jérémy tourna la tête et vit son frère Éric assis sur la chaise dans le coin de la pièce.

Son visage était à peine éclairé par le peu de lumière venant de la fenêtre, qui semblait d’ailleurs s’assombrir à vue d’œil, comme si la nuit tombait anormalement vite.

Il distinguait un regard vide et sans âme sur le visage d'Éric, fixant le sol.


Jérémy :

"Ha bah tu es finalement arrivé avant moi haha ! Un peu d’aide ne serait pas de refus, grand frère !"


À peine avait-il tourné son regard vers sa sœur qu’il la vit quitter le sol.


Elle gardait la bouche fermée, comme pour étouffer ses sanglots.


Elle semblait s’envoler, elle était maintenant à au moins 70 cm du sol.

Son corps formait une croix, les bras tendus de part et d'autre de son corps.

On aurait dit qu’une force invisible la soulevait par les poignets et les chevilles.


Rose flottant dans l'air

Jérémy était pétrifié.

Il ne bougeait plus.

Qu’était-il en train de se passer ?


Tout à coup, sa sœur se mit à danser de manière totalement désarticulée.

Flottant dans les airs.

À la manière d’une marionnette.


Rose (murmure à peine audible) :

"Je t’en supplie, réveille-toi. Accepte la vérité."


bruit de claque


Sa sœur semblait s’être pris un coup par une entité invisible.


Petit à petit, Jérémy vit comme une ombre se former derrière elle.

Cette ombre devint une silhouette, imposante.

Gigantesque.


Il entendit ensuite des grognements, tels ceux d’une bête affamée.


La silhouette devint un corps... qu’il connaissait bien.


Jérémy :

"Non, pitié !"


C’était lui.

L’espèce de monstre qu’il avait connu il y a 20 ans.

Sa tête touchait presque le plafond.

Dans ses mains, il tenait une croix en bois.

À chaque extrémité de celle-ci était attachée une ficelle, qui était elle-même reliée aux poignets et aux chevilles de sa sœur.

Il était tourné vers le miroir de la pièce, s’observant, comme si Jérémy n’était pas là.

D’une seule main, il faisait danser sa sœur, qui semblait désormais être redevenue une enfant.

Tel un marionnettiste. Macabre.


Lorsqu’il regarda à nouveau son frère sur la chaise, il était sans vie.

Son cadavre n’avait plus de paupières, sa tête était peinte en blanc, et ses yeux révulsés donnaient l’impression qu’il était un véritable jouet.


Ses poignets et chevilles étaient découpés.


Tandis que le corps de sa sœur, inerte, virevoltait devant lui, Jérémy sentit sa vie défiler en un instant.

Il était pétrifié. Ses membres refusaient de bouger. Sa bouche, elle, restait désespérément muette.


Rose était mutilée de partout. Ses poignets et ses chevilles étaient marqués de profondes cicatrices, ses tempes boursouflées par des coups répétés, et des coupures parsemaient sa peau meurtrie.

Des larmes coulaient en silence sur son visage.


Après ce qui lui sembla une éternité, l’homme lâcha brutalement Rose, comme un enfant lassé d’un jouet sans intérêt.


D’un geste lent, il referma la porte, la poignée grinçant sous la pression de son index et de son pouce gigantesques.


Rose (voix faible, murmurante) :

"Enfin... tu es revenu."



Partie 4 : Le réveil


Elle lui raconta tout.


Ce n’étaient pas vingt années qui s’étaient écoulées… mais seulement deux.

Leur frère, Eric, était bel et bien mort ce jour-là. Jérémy et Rose, eux, n’avaient jamais réussi à s’enfuir. L’homme, si on pouvait le considérer comme tel, les avait attrapés tous les deux. Un dans chaque main.


Leurs parents les avaient cherchés sans relâche. Même deux ans plus tard, Rose les entendait encore passer dans la rue, criant désespérément leurs prénoms. Elle avait même vu la police patrouiller à plusieurs reprises... mais jamais personne n’avait pris la peine d’entrer dans cette maison maudite.


Un jour, Rose avait hurlé de toutes ses forces, espérant que quelqu’un l’entende. Mais la sentence infligée par l’homme avait été terrible.

L’homme ne parlait jamais. Il grognait, il soufflait, il grondait. Une véritable bête sauvage.

En deux années d’horreur, Rose avait compris son fonctionnement, sa routine macabre, son obsession malsaine.

Visuel du marionnettiste

Ils l’appelaient le Marionnettiste.


Car cet être avait une fascination pour les marionnettes… humaines.


Il avait kidnappé plusieurs enfants et les avait transformés en pantins vivants... ou presque.

Car pour une raison qu'elle ignorait, plus un enfant faisait du bruit, plus il désobéissait, plus il recevait de terribles châtiments. La majorité n’avaient pas survécu.

D’abord, il commençait par trancher, petit à petit, les nerfs des poignets et des chevilles de ceux qui osaient se débattre quand il jouait à la marionnette avec leur corps, rendant impossible toute résistance.


Puis il s’attaquait aux paupières. Si un enfant osait le regarder dans les yeux, ils les lui tranchaient.

Rose avait compris une règle : les enfants les plus bruyants recevaient les pires souffrances. Il les frappait, les lacérait, les brûlait.


La majorité de ses marionnettes humaines n’était donc en vérité que des cadavres d’enfants qui avait tenté tant bien que mal de se débattre ou de lutter pour leur vie. En deux ans, ils avaient vécu un enfer sans nom.


Le marionnettiste venait se servir d’eux comme des jouets au gré de ses humeurs. Il leur donnait le strict minimum à manger. Ils dormaient tous à même le sol et enfermaient les moins sage d’entre eux dans la pièce la plus sombre de la maison en les recouvrant d’un drap. S’ils osaient bouger, s’ils faisaient le moindre bruit… ils étaient tués sur le champ.


Jérémy n’avait pas survécu à cette horreur de la même façon que Rose.

Il s’était construit un monde imaginaire, un refuge mental contre la réalité insupportable. Il s’était créé une autre vie, une vie rêvée.


En psychiatrie, cela s’appelle un trouble de l’adaptation avec symptômes dissociatifs.

Lorsque l’esprit subit un stress prolongé, il peut développer des mécanismes de défense, se réfugiant dans une illusion plus agréable pour se protéger du traumatisme.

Ainsi, sa voiture de rêve n’était en réalité qu’un vieux jouet poussiéreux retrouvé dans un coin de la maison.

Sa femme ? Une simple peinture oubliée, accrochée de travers à un mur décrépi.

Quant à son fils... il n'était qu'une photo d’un enfant disparu, découpée dans un journal abandonné sur une table bancale.


Tout n’avait été qu’une illusion.

Et la vérité venait enfin de le rattraper.



Partie 5 : Le plan


À peu près 10 jours s’était écoulé depuis la reprise de lucidité de Jérémy. Enfin.. A peu près. A vrai dire, tous les enfants avaient perdus la notion du temps.

Il n’y avait plus qu’une seule question qui obsédait Jérémy :

Comment sortir de cet enfer ?


S’échapper par la fenêtre ? Impossible. Chacune d’entre elles était fermée et barricadée de l’extérieur avec des épais bout de bois.

Sortir par la porte d’entrée peut-être ? Non plus, elle était fermée à double tour et l’homme ne sortait qu’une fois par mois pour ramener de la nourriture, en prenant bien soin d’enfermer tous les enfants dans la cave avant de partir.

Casser les murs de bois de la maison pour sortir ? Inenvisageable. La moindre mouche qui volait pouvait réveiller le marionnettiste, qui se mettrait dans une rage folle.


Ils n’étaient plus que quatre encore en vie, Jérémy et Rose compris. Tous mutilés, épuisés, à bout de forces. Une rébellion n’était pas non plus une option.

Quelle solution leur restait-il ?


Leurs poignets et chevilles saignaient, attachés en permanence aux sinistres croix de bois par d’épaisses ficelles incrustées dans leur chair à force d’être soulevé tel des pantins.

Jérémy avait essayé de mordre ces liens pendant des heures, sans succès. Ils étaient trop résistants.

C’est alors qu’une idée lui vint.


Il avait remarqué un détail troublant : certains des enfants, ceux qui étaient morts depuis des semaines, continuaient d’être manipulés par le Marionnettiste. Leurs corps, froids et sans vie, étaient toujours assis à la même place, sur des chaises dans la chambre à l’étage, où se tenait d’ailleurs le cadavre de son frère qui commençait à se décomposer à vive allure.

Les enfants encore en vie ne venait que rarement dans cette pièce. Et pour cause : l’odeur était nauséabonde.


Mais c’est ici que le marionnettiste s’adonnait à sa pratique malsaine. Si lorsqu’il montait dans cette pièce, il manquait un seul de ses pantins, vivant ou mort, il se mettait dans une rage folle et fouillait la maison de fond en comble pour punir celui qui avait osé bouger.

Les enfants le savaient : quand les pas du monstre dans les escaliers résonnaient dans la maison, il fallait se précipiter dans cette pièce pour s’y trouver quand il entrait.


Et si…


Jérémy chuchota son idée aux autres enfants.

C’était leur seule chance. Un plan risqué, mais il valait mieux tenter l’impossible que de vivre ici pour l’éternité.


À la nuit tombée, les deux autres enfants s’étaient cachés à l’étage et Rose au rez-de-chaussée. Jérémy lui, avait pris place à côté de son frère, faisant semblant d’être mort.

Le Marionnettiste, comme chaque nuit, vint les examiner. Il passa lentement devant chacun d’eux, ses yeux noirs scrutant leurs visages figés. Il renifla, grogna… puis hurla une fois qu’il remarqua que 3 de ses jouets manquait.


Le cœur du jeune garçon battait si fort, qu’il eut peur que le bruit de ses battements attire l’homme.

Ce dernier, en rage totale, se précipita vers les escaliers. De chaque côté de cet escalier étaient couché les deux autres enfants qui mimait d’être mort.

L’homme s’approcha d’eux, il leva la main...


Jérémy courut dans sa direction. Sa croix de bois dans la main, il réunit ses dernières forces et sauta dans le dos du marionnettiste, les deux pieds en avant il le poussa de toute ses forces avec ses pieds.


Jérémy :

“YAAAAAAH”


Les deux enfants de part et d'autre de l’escalier, tenait mutuellement leur fils, il les tendirent en même temps de toute leur force.

Le monstre, poussé par Jérémy, s’y pris les pieds dedans et déboula tous les escaliers.

A peine avait-il eu le temps de s’étaler sur le sol du RDC que Rose se jeta sur lui


Rose :

“AAAAAAH”


Elle frappa la tête de la bête de toute ses forces avec sa croix de bois.

Les trois autres enfants lui sautèrent dessus pour faire de même.

Une fois que l’homme ne semblait plus bouger, ils se précipitèrent vers la fenêtre que les frères et sœur avait cassé deux ans auparavant. Ils tapèrent de toutes leurs forces pour faire céder la barricade de bois.

Deux morceaux se cassèrent. L’air frais leur fouetta le visage.


A peine ils eurent le temps de se faufiler dehors qu’une main gigantesque sorti de l’interstice.


la main d'un homme sortant de la fenêtre

Sans réfléchir, Rose saisit une pierre au sol et la balança de toutes ses forces contre les doigts difformes. Un hurlement guttural s’éleva dans la nuit, tandis que la main disparaissait brièvement dans l’obscurité.

Ils coururent.

À perdre haleine.

[enfants haletant]

À travers les champs, les ronces, les buissons, jusqu’à voir enfin les premières lumières du village.

Les jambes tremblantes, les poumons en feu, ils s’écroulèrent devant la première maison venue, frappant désespérément à la porte.


Les lumières s’allumèrent. Des voix inquiètes s’élevèrent.

Ils étaient sauvés. Enfin.



Partie 6 : Retour au foyer


Après un long séjour à l’hôpital, il était temps pour Rose et Jérémy de retrouver le confort de leur foyer et faire une croix sur toutes ces atrocités.


Jérémy monta à l’étage, et, mort de fatigue, il s’assoupie dans son lit douillet.

...

...

...

Rose :

“Jérémy... Réveille-toi”

 


Fin.

Posts récents

Voir tout

Commentaires

Noté 0 étoile sur 5.
Pas encore de note

Ajouter une note
bottom of page