top of page

La Peste Dansante de Strasbourg

Une maladie de l'esprit

gravure de la peste dansante de 1518

La Peste Dansante de Strasbourg (1518) : quand la ville s’est effondrée en dansant

En juillet 1518, un phénomène aussi étrange que terrifiant s’abat sur Strasbourg.

Une femme se met soudainement à danser sans raison, seule, au milieu de la place publique. Elle danse sans musique, sans pause, jusqu’à l’épuisement.

En quelques jours, des dizaines d’autres personnes la rejoignent, puis des centaines. Incapables de s’arrêter, ils tournent, tombent, se relèvent, suent, saignent… et continuent. L’épidémie silencieuse que l’on appellera la Peste Dansante vient de commencer.

Voici l'histoire qui se cache derrière la gravure d'Hendrick Honduis, que vous pouvez écouter au format audio

Écouter le podcast :

Une femme qui danse seule : le début d’une contagion incompréhensible

Tout commence avec une certaine Frau Troffea, une habitante de Strasbourg. Le 14 juillet 1518, elle entre dans une transe soudaine sur la grande place. Elle danse sans interruption pendant plusieurs jours. Bientôt, des passants la rejoignent : un jeune homme, une femme enceinte, des enfants. En moins d’une semaine, plus de 100 personnes sont emportées dans cette frénésie collective. La scène devient quotidienne. Les habitants barricadent leurs maisons. Les commerçants ferment leurs échoppes. La ville observe, impuissante.

Certains danseurs tombent de fatigue, d’autres hurlent ou rient de manière incontrôlée. On compte plusieurs morts par arrêt cardiaque ou par simple épuisement. Chaque nuit, la danse recommence.

Une réponse médicale absurde : laisser danser pour guérir

Les autorités consultent alors les médecins de la ville. Selon la médecine de l’époque, il s’agirait d’un excès de sang chaud, un déséquilibre des humeurs corporelles. Pour guérir, il faut… danser davantage. La ville décide donc d’accompagner la folie : elle installe des estrades, engage des musiciens et organise de véritables bals publics pour « canaliser le mal ».

Les tambours et les fifres résonnent sans cesse. Mais loin d’apaiser les malades, la danse s’intensifie. Les danseurs s’écroulent les uns après les autres. Strasbourg devient un théâtre de souffrance à ciel ouvert.

Le retour à la superstition et la tentative d’exorcisme

Face à l’échec des médecins, les autorités religieuses reprennent la main. On accuse des forces surnaturelles, les démons, les étoiles…

La ville organise un pèlerinage en chassant les danseurs fous vers le sanctuaire de Saint Guy, réputé guérisseur de troubles nerveux.

Les malades y sont envoyés pour recevoir bénédictions et soins, accrochés par des cordes à des charrettes.

Peu à peu, la transe collective prend fin. Mais la ville, elle, ne s’en remettra jamais vraiment.

Peinture des danseurs fous

Quelle explication possible pour la Peste Dansante ?

Plusieurs théories ont faits surface au fil du temps mais aucun n'a été complètement admise :

  • L’ergotisme : causé par l’ergot du seigle, un champignon toxique pouvant provoquer des hallucinations et des convulsions. Mais cette explication ne suffit pas : l’ergot provoque surtout des douleurs physiques sévères, peu compatibles avec les récits historiques.

  • La psychose collective : la plus largement admise. Strasbourg en 1518 est une ville rongée par la famine, la peur des épidémies et les tensions religieuses. Le climat anxiogène aurait pu favoriser une transe collective, où l’imitation et la peur deviennent contagieuses.

  • L’origine surnaturelle : pour d'autres, cette danse n’était pas seulement un symptôme psychologique. Des témoins affirment avoir entendu des voix, vu des possédés, ou perçu une musique venue de nulle part. Une force ancienne et invisible, transmise de corps en corps, que nul ne pouvait expliquer.

Une histoire oubliée… mais pas effacée

Aujourd’hui, rien à Strasbourg ne rappelle la Peste Dansante. Aucune plaque, aucun monument. Et pourtant, cette histoire vraie reste l’un des épisodes les plus énigmatiques de l’histoire européenne. Un cas unique, à la frontière entre la médecine, le mythe et l’horreur. 

La Peste Dansante de Strasbourg demeure un mystère. Un événement aussi terrifiant qu’incompréhensible, qui nous rappelle à quel point la peur, la foi et l’esprit humain peuvent se mêler pour créer des tragédies d’un autre genre.

Écoutez l’histoire complète en version audio 🎧

Retrouvez cette histoire racontée dans notre épisode immersif de Chronique d’une image, avec ambiances sonores, extraits de lettres et récits d’époque. Laissez-vous transporter au Moyen-Âge le temps d'un instant.

OU

bottom of page